Être parent

Par Johane Filiatrault

On entend malheureusement souvent dire : « Les enfants, ça coûte cher!»  ou « Petits enfants, petits problèmes, grands enfants, grands problèmes».  Y a-t-il moyen de voir les choses autrement?

Heureusement qu’il y a les enfants!  Ils sont les plus merveilleux cadeaux qui soient, une inestimable richesse pour ceux qui les côtoient.  J’ai personnellement eu la joie d’en enfanter sept et c’est leur existence qui donne sens à la mienne.  Quand on ouvre nos bras pour y recevoir la merveilleuse et fragile chose qui vient de glisser de notre ventre, on n’a pas vraiment idée jusqu’à quel point ce petit être s’en vient bouleverser notre vie!  Son extrême dépendance nous forcera à sortir de nous-même, à nous déranger pour son bonheur, à aimer quoi.  Un enfant, c’est un gouffre sans fond qui appelle l’amour et nous pousse constamment à dépasser nos limites pour lui donner de nous ce qu’il y a de meilleur.  Qui voudrait donner du mauvais à ses enfants?  Et quand malheureusement ça se produit, il est toujours temps de nous ressaisir : soyons indulgents envers nous-mêmes (eux nous pardonne si vite que c’en est bouleversant!).

Quand nous décidons de donner la vie, à quoi nous attendons-nous : à recevoir une gentille petite copie de nous-mêmes qui flattera notre ego et dont nous serons fiers?…

Je me rappellerai toujours le choc ressenti à la naissance de mon premier fils.  «Le médecin te tenait à bout de bras sous les aisselles et il te montrait à nous.  Là je t’ai vraiment vu et j’ai eu un choc.  Je ressentais exactement ce qu’on ressent quand on fait face à un étranger.  Tu m’étais inconnu.  Je ne me sentais pas ta mère.

Puis le médecin t’a placé sur ma poitrine.  Tu as tout de suite tourné ta tête vers moi et tu m’as regardée.  J’ai plongé mes yeux dans les tiens et, dès lors, tu es devenu mien.  À travers ce regard, un lien vital s’est créé entre nous, quelque chose de très puissant.  J’ai lu dans tes yeux comme dans un livre.  Ton regard était plein de surprise, d’étonnement, d’interrogation.  Aucune peur en toi.»  Ce premier regard que nous avons échangé n’était pas celui d’un bébé face à un adulte : nous étions deux êtres humains qui communiquions d’égal à égal.

Être parent, c’est aider un autre être à atteindre son plein épanouissement.  Comment?  En lui ouvrant nos entrailles, jour après jour, en le laissant nous atteindre et nous remettre en question.  Nous l’avons aimé tout petit et sans défense et voilà que, progressivement, il se confrontera à nous, étape obligée vers l’autonomie.  Mon aîné et moi sommes ressortis égratignés de son adolescence (il aura bientôt 17 ans), mais notre lien s’est resserré.  Il n’est pas comme j’aurais voulu qu’il soit : il est lui-même et c’est parfait comme ça.  Il a appris à respecter mes limites et j’ai appris à respecter ce qu’il est.  Tous les enfantements sont douloureux… et l’adolescence enfante un adulte.

Je me rappelle les innombrables heures que j’ai passées avec ravissement à regarder vivre mes enfants, tous les merveilleux instants de tendresse partagée…  heures très douces; joie parfaite : celle d’être parent.

 

Roses, mais fiers!

Par Johane Filiatrault

Chapeau les gars!  La radio de Radio Canada diffusait récemment une entrevue avec des femmes étrangères immigrées au Québec : l’une provenait du Mexique, l’autre d’un pays musulman, une autre de l’Italie, etc.  La question posée à ces femmes : «À quel endroit sur la planète trouve-t-on les hommes les plus ‘roses’ ? »   Elles ont été tout à fait unanimes : chez nous au Québec.

On ne doit bien sûr pas généraliser; des hommes machos et égocentriques, il y en a encore trop, chez nous comme ailleurs.  Mais il faut quand même se réjouir de cette avancée culturelle : que nos hommes remportent la palme dans ce domaine est incontestablement une victoire pour nous également, les femmes.  Victoire aussi de toutes nos ancêtres qui, depuis le douloureux enfantement de la fragile colonie de Nouvelle France, ont courageusement œuvré aux côtés de leur homme pour bâtir ici une terre de liberté et de justice, et qui se sont gagnées, par leur fierté et leur droiture, le respect de leur conjoint comme de leurs fils, d’une génération à l’autre.

Un homme rose c’est quoi?  C’est un homme ayant compris qu’une femme ne se conquiert pas qu’une seule fois.  Il ne prend pas sa conjointe pour acquise et investit beaucoup d’énergie pour reconquérir chaque jour celle qu’il aime.  Il sait aussi que, pour conquérir une femme, il ne s’agit pas seulement de faire l’étalage de sa puissance (comme on l’observe chez les animaux en période de rut!) mais qu’il s’agit surtout de manifester un réel intérêt pour son bonheur à elle et celui de ses enfants, dû-t-il pour cela sacrifier une partie de son plaisir à lui.

Vous rendez-vous compte, femmes du Québec, que vous êtes nées sous les cieux les plus favorables au monde?  Réalisez-vous que vous avez plus de chances de vivre heureuses que si vous aviez vu le jour n’importe où ailleurs?  Il y a ici au kilomètre carré plus de «spécimens mâles» potentiellement capables d’écrire avec vous une belle histoire d’amour qui dure que nulle part ailleurs sur la planète!  Encore faut-il que nous y mettions du nôtre!  Élever nos filles comme des princesses gâtées et capricieuses risque fort de gâter la sauce; ça ne vaut guère mieux que la pas si lointaine époque où on élevait les gars comme s’ils étaient les rois et maîtres.  Si la libération de la femme nous mène à écraser tout ce qui est masculin autour de nous, elle se solde incontestablement par un échec.  Est-il possible, mesdames, de nous élever fièrement jusqu’à notre juste place sans abaisser durement les hommes au côté desquels nous évoluons?

Les filles ont souvent le haut du pavé actuellement : meilleurs dossiers scolaires; meilleures chances pour les femmes dans les causes de divorces, de pensions alimentaires ou de garde d’enfants (les hommes s’y sentent souvent lésés, à tort ou à raison);  attitudes dominantes des femmes par rapport aux hommes dans plusieurs publicités.  Résultat : les gars ont du mal à trouver leur place.  Heureusement, on commence à parler de la souffrance des garçons à l’école où ils se voient imposer une manière d’apprendre peu adaptée à leur masculinité.  Ils ont droit à leur différence…et il est grand temps qu’ils retrouvent confiance en eux!  C’est d’ailleurs à une conclusion similaire qu’en venaient les immigrantes de l’entrevue radiophonique : les hommes d’ici font d’excellents conjoints, mais elles les aimeraient… un tantinet plus séducteurs.  Plus fiers d’être mâles, quoi!